Intervention de l'ONG au forum de la gratuité à Lyon le 5 janvier 2018
L’accès à l’énergie est aujourd’hui devenu une nécessité. Mais l’énergie ne se limite pas seulement à la lumière et au confort. Dans les pays où son accès est très limité voire inexistant, l’accès à l’électricité permettra d’améliorer l’éducation, l’accès aux soins et à l’enseignement, l’autonomie des femmes, ou encore de participer au développement économique. Il s’agit donc de répondre à des besoins essentiels.
Mettre fin à la précarité et à la pauvreté énergétiques, c’est aussi aider les populations défavorisées à accéder aux moyens de cuisson salubres et participer de ce fait à réduire le nombre de personnes qui meurent prématurément chaque année en raison de la pollution causée par les conditions de combustion de la biomasse.
L’énergie source d’inégalité…Pour un monde composé de 7,5 milliards d’humains aujourd’hui, et bientôt de 10 dans un demi-siècle ; un tiers des habitants de la planète n’a pas du tout accès aux sources d’énergies modernes (Pétrole, Gaz, Electricité) et 80% de la population mondiale ne consomment que 20% de l’énergie totale.
La première question posée à l’humanité est celle de la fourniture d’énergie. La croissance démographique va se poursuivre au moins jusqu’en 2050, avec une forte poussée dans les pays en voie de développement, qui devraient concentrer, à terme, 80% de la population mondiale.
Je rappelle qu’1,4 milliards d’êtres humains n’ont pas accès à l’électricité, 2,8 milliards de personnes sont contraintes de se chauffer et de cuisiner à partir du bois ou d’autres combustibles dont l’utilisation est dangereuse pour la santé. Avec pour autre conséquences du temps passé à la corvée de bois dévolu aux femmes et aux enfants, pouvant aller jusqu’a une demi-journée, et une contribution à la déforestation, à désertification et à l’émission de CO2.
En Europe on estime, qu’il existe 75 à 125 millions de personnes en précarité énergétique. En France plus de 12 millions de personnes sont en précarité énergétique.
65% des habitants de la planète qui ont accès à l’électricité ne disposent que d’une puissance inférieure à 180 W (environ trois lampes). Pour eux, la mortalité infantile peut aller jusqu’à 180 % (comme en Angola) quand elle est en moyenne de 4‰ (2,72‰ en Suède) dans les pays développés, l’espérance de vie est de 36 ans car sans énergie, pas d’éducation, pas de chaîne du froid et donc, pas de vaccins, pas d’eau potable.
L’inégalité face à la consommation est totale et se constate entre les hémisphères nord et sud, sur un même continent, dans une même région du globe, dans un même pays voire dans une même commune.
L’énergie pour tous doit être reconnue comme un droit fondamental par l’ONU et les Etats. Ce droit doit être inscrit dans chaque constitution.
L’Accès à l’énergie est-il un droit vital pour le développement humain durable ?
L’Organisation des Nations Unies répond par l’affirmatif ! Alors, comment inscrivons-nous ce droit fondamental dans la constitution de chaque pays, et comment créons-nous les conditions mondiales qui puissent permettre à toutes les populations, sans exception, d’accéder à l’énergie ?
Comment, également, mettre en œuvre et faire respecter ce droit fondamental reconnu par l'Organisation des Nations Unies, lorsque concomitamment l'énergie est considérée comme un bien « marchand », soumis aux lois du marché et de la concurrence par l'Organisation Mondiale du Commerce ? Comment faire acter par chaque état que cet accès à l’énergie est un droit vital pour sa population et qu’il doit relever le défi de taille auquel est confrontée l’humanité : « le réchauffement climatique » ?
L’électricité décarbonée est donc un levier important de la réduction des émissions de CO2 dans le monde. Tous les scénarii du rapport du GIEC témoignent d’une place plus importante de l’électricité dans le futur bilan énergétique mondial.
Les causes de la précarité énergétique dans les pays développés,
1. La faiblesse des revenus du foyer
2. La qualité du logement mauvaise isolation thermique
3. Le coût de l’énergie
La première cause est la faiblesse des revenus du foyer, bien évidemment liée aux problématiques de l'emploi, des salaires et des pensions. On en revient au final à la sempiternelle question de la lutte contre la pauvreté qui pourrait trouver sa réponse dans une meilleure répartition des richesses nationales.
Cette question n’est jamais abordée lors du traitement ou des rapports sur la précarité énergétique. Pourquoi ?
La deuxième cause, est la mauvaise qualité de l’isolation thermique du logement.
Le «mal logement» s’accompagne toujours de «mal chauffage».
La troisième cause, le coût de l’énergie, Là encore, cette question n’est que très rarement abordée. La libéralisation du marché avec ses privatisations, la concurrence dit « libre et non faussé », la fin des tarifs réglementés dans de nombreux pays Européens ont fait flamber les prix entre 70 à 140% d’augmentation de l’électricité en Europe. Cela s’est accompagné d’une précarité énergétique avec 125 millions d’européen en précarité énergétique.
La fin des tarifs régulés en France aura des conséquences sur le prix de l’énergie. Comme en Allemagne avec un prix moyen à 30 cts d’euro du Kwh contre 16 cts d’€ du Kwh pour la France.
En France, on pourrait tout de suite faire baisser le prix du Kwh avec une TVA à 5,5% au lieu de 20% actuellement. Le KWH électrique est taxé à 34%, là aussi il y aurait besoin de revoir ces taxes.
Dans beaucoup de pays, même si l’on développe des moyens de production et que l’on améliore sa déserte, l’accès à l’électricité passe aussi par la gratuité. Nelson Mandela l’avait bien compris c’est une des premières mesures prises à son arrivée au pouvoir, un volume d’électricité gratuite pour les bidonvilles. Au Brésil, le plan de Lula d’électrification des favelas auquel a participé notre ONG Droit à l’Energie a été aussi de distribuer une tranche gratuite. Ces mesures ont permis l’accès à l’électricité dans ces pays aux populations qui jusque-là en étaient exclus.
La lutte contre la pauvreté énergétique est un choix politique. L'interdiction des déconnexions et des plans d'action nationaux devraient être mis en place en France, plutôt que des mesures symboliques. Il est clair que la volonté politique manque toujours.
En France, nous demandons l’ouverture de négociation et exigeons :
- le maintien des tarifs sociaux électricité et gaz, avec une augmentation significative de leurs montants afin de répondre efficacement au droit à l’accès à l’énergie, droit fondamental pour la vie. Le chèque énergie devrait être réservé aux autres sources de chauffage.
- une énergie reconnue comme produit de première nécessité, bénéficiant d’une TVA à 5.5 % sur les kWh électricité et gaz, et non pas à 20 % comme un produit de luxe
- le maintien des tarifs régulés (fixés par l’Etat) pour l’électricité et le gaz pour les usagers.
- Un tarif de l’électricité et du gaz au juste prix permettant l’accès à tous
- une interdiction des expulsions de logement et des coupures tout au long de l’année pour les familles en situation de précarité.
- un plan gouvernemental à la hauteur des enjeux concernant la réhabilitation des logements privés et publics, collectifs et individuels.
- Une réflexion et une construction d’un tarif solidaire, avec une tranche gratuite répondant aux besoins fondamentaux des familles.
- L’accès à l’électricité un droit fondamental inscrit dans la constitution.