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Un droit à l'énergie pour tous les européens - contribution de l'ONG droit à l'énergie SOS FUTUR

18/01/18 Publications, Europe

Avant –propos

L’accès à l’énergie est reconnu comme une condition essentielle au développement humain. Les membres des Nation Unies reconnaissant l'importance de l'énergie pour le développement durable. Lors de l'Assemblée générale des Nations Unies en 2012, l’ONU a proclamé dans sa résolution 65/151. « 2012, année internationale de l'énergie durable pour tous ».

Cette Année internationale de l’énergie durable pour tous est l’occasion de sensibiliser à l’importance d’améliorer l’accès durable à l’énergie, l’efficacité énergétique, et l’énergie renouvelable au niveau local, régional et international.

Les services énergétiques ont un effet profond sur la productivité, la santé, l’enseignement, les changements climatiques, la sécurité alimentaire et la sécurité de l’approvisionnement en eau ainsi que les services de communications.

C'est pourquoi, l’absence d’accès à une énergie propre, abordable et fiable entrave le développement humain, social et économique et constitue un obstacle majeur à la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement.

En Europe, tout État doit garantir les conditions nécessaires à la sécurité de l’approvisionnement énergétique de ses citoyens et à leur bien-être effectif, c’est-à-dire couvrir leurs besoins fondamentaux en énergie (éclairage, chauffage, cuisson, accès au froid, à l’éducation, et mobilité). A contrario, la précarité désigne l’incapacité pour un nombre important de famille (entre 75 à 125 millions d’européens sont en précarité énergétique) de se chauffer convenablement pendant la période d’hiver. Mais l’accès à l’énergie ne doit pas se limiter à la notion du chauffage pendant la période d’hiver.

L’accès à l’électricité est aujourd’hui devenu une nécessité. En effet l’accès à l’énergie ne se limite pas seulement au chauffage et à la période hivernale. S’il n’y avait pas l’électricité, dans la plupart des pays Européens, il n’y aurait pas d’éclairage, pas de moyens de cuissons et de conservation des aliments avec rupture de la chaine du froid,, pas d’accès à l’éducation et à la connaissance. Il y aurait des difficultés pour se soigner. Pas d’accès à internet, aux médias de communication, aux divertissements, remise en cause de l’émancipation des femmes, ou encore de participer au développement économique… En général, le non accès à l’électricité entraînerait une amplification de l’exclusion sociale avec l’amplification de la désocialisation. Il s’agit donc de répondre à des besoins essentiels. Mettre fin à la précarité et à la pauvreté énergétique, c’est aussi aider les populations défavorisées à sortir de la ghettoïsation.

La situation dans l’Union Européenne.

Selon la Commission Européenne, 11% des habitants de l‘Union européenne sont en situation de précarité énergétique. Ils ne parviennent pas à chauffer convenablement leur domicile pour un coût abordable. Les principales causes de ce problème sont la hausse des prix de l‘énergie, la faiblesse des revenus et la mauvaise isolation des habitations (1).

Selon l’Etude de la Précarité Energétique en Europe (l’EPEE 2009), il y a entre 50 et 125 millions de personnes en situation de précarité énergétique en Europe. Ces chiffres risquent d’augmenter à l’avenir, concomitamment à la crise financière, à la hausse des prix de l’énergie et à l’augmentation des factures thermiques. (2)

Nous sommes en 2017, la situation de ce phénomène de précarité n’a fait qu’empirer. Même dans les pays où il existe une définition de la précarité énergétique et des mesures sociales, le nombre de familles a augmenté.

Exemple, en France, selon INSEE (2015) 15% de la population française est en précarité énergétique, 22% de la population pourrait se retrouver dans cette situation. (3)

La hausse des coûts de l‘énergie rend la précarité énergétique de plus en plus préoccupante, en particulier dans un contexte de stagnation ou de baisse des revenus disponibles. La libéralisation, la concurrence libre et non faussée du marché longtemps vantée comme un remède contre les prix élevés semblent avoir eu l‘effet opposé.

Selon l’INSEE, le risque de vulnérabilité énergétique étant sensible aux prix des énergies, il peut être intéressant d’étudier l’impact d’un choc sur ces prix. Par exemple, si le coût du chauffage augmentait brusquement de 40 %, toutes choses égales par ailleurs, la part des ménages en situation de vulnérabilité énergétique pour le logement s’élèverait de 12 points, passant de 15 % à 27 %. L’ONPE, à juste titre, rappelle qu’une augmentation de 10 % du prix de l’énergie ferait basculer 423 235 ménages supplémentaires en situation de précarité énergétique Les logements les plus touchés seraient les plus anciens et les plus spacieux. Les ménages les plus affectés seraient ceux de la première moitié de la distribution des niveaux de vie, les retraités et agriculteurs.

  1. DROIT À L’ÉNERGIE

(Droit fondamental inscrit dans les constitutions).

Pour éradiquer la précarité énergétique en Europe, il faudrait inscrire dans la législation Européenne un droit à l’énergie pour tous les citoyens. Avec l’interdiction des coupures et la privation de la fourniture d’énergie quelle que soit la période de l’année, comme cela est déjà le cas dans certains pays pour l’approvisionnement en eau.

  1. LES TARIFS DE L’ENERGIE

Devant l’incapacité du marché et de la libéralisation du secteur de l’énergie de garantir une énergie abordable à tous et de garantir l’accès à l’énergie comme un droit pour tous. La meilleure protection contre les aléas de la volatilité des marchés de l’énergie est la réglementation des prix pour les ménages. Les tarifs réglementés et la péréquation doivent être maintenus et non progressivement supprimés.

De plus, les ménages à faibles revenus devraient bénéficier de tarifs sociaux spécifiques qui leur assureraient des conditions de vie décente. Ces tarifs devraient leur garantir l’accès pour répondre à tous leurs besoins fondamentaux. Personne ne devrait être obligée de choisir entre se chauffer ou se nourrir ou tous autres besoins fondamentaux.

  1. L’ENERGIE UN BESOIN FONDAMENTAL ? PAS UNE RECETTE D’IMPOT

L’électricité, le gaz sont considérer dans de nombreux pays Européen comme un revenu via l’impôts et taxes (en 2014, EUROSTAT) le kWH électrique était taxé en moyenne dans l’UE à 32%, dans la zone Euro à 36%, + 52% en Allemagne, 31% en France, 5% au Royaume Uni. Et l’on peut dire la même chose pour le gaz taxé à 23% dans l’UE et 28% dans la zone Euro. Ces taxes sont bien évidement des revenues (impôts indirect, TVA) pour les Etats et les collectivités locales.

Dans de nombreux pays, ces taxes financent aussi les énergies renouvelables. Le développement de ces énergies ne se fait malheureusement pas pour répondre aux besoins de production, ni aux enjeux climatiques mais simplement pour répondre aux profits des investisseurs, toujours à la recherche d’une rentabilité à deux chiffres. On se retrouve dans la situation ubuesque puisque les ménages en situation de pauvreté et en précarité énergétique participent aux profits des plus aisés par le paiement d’une taxe élevée sur leur facture. En 2017, les ménages allemands contribueront (pays avec le Danemark où les taxes sur le kWH sont les plus élevées) via la Taxe EEG prélevée sur leur facture, la somme de 24 milliards d’€. Les français contribueront à financer les énergies renouvelables pour la somme de 17 milliards d’€ directement prélevés sur leur facture via la CSPE et directement versés dans les poches des investisseurs des ENR (19,5 % de cette taxe pour la péréquation tarifaire des DOM, 4,6% pour les tarifs sociaux, les 75% pour les ENR). Pour mémoire, lors de sa création en 2004, la CSPE représentait 4,5 milliards d’€.

Cette politique de libéralisation avec la création d’un marché de l’électricité n’a qu’un objectif, celui de rentabiliser les actionnaires qui veulent un retour à hauteur de 15 % de rentabilité. Aujourd’hui, au regard de l’urgence climatique, il est plus que nécessaire de s’interroger si cette politique de développement anarchique des énergies renouvelables permet de répondre concrètement à nécessaire baisse des émissions de CO2 en Europe et donc d’enrayer le réchauffement climatique.

D’ailleurs, de nombreux acteurs de l’énergie s’inquiète de la dérive des prix de l’électricité en Europe due à cette politique de taxation et de subvention. (4)

Les émissions de CO2 issues de la consommation d'énergie ont légèrement augmenté au sein de l'Union européenne en 2015. Comme l'indique une étude d'Eurostat, près des deux tiers des Etats membres ont vu leurs émissions croître malgré des objectifs de réduction ambitieux au niveau communautaire. Le chemin semble donc encore long pour atteindre l'objectif affiché d'une réduction de 80% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, par rapport aux niveaux de 1990. Pour améliorer ses chances d'y parvenir, l'Union européenne s'est d'ailleurs fixée, en 2014, les objectifs intermédiaires de 40% de réduction d'ici à 2030 et 60% d'ici à 2040. Mais malheureusement la commission européenne reste sourde à la réalisation d’un bilan sur 20 ans de libéralisation du marché de l’électricité réclamé par de nombreuses organisations syndicales et ONG, (EPSU, CES, DAE SOS FUTUR……)

«L’énergie n’est pas un service de luxe offrant un niveau de vie élevé, mais un produit de première nécessité qui peut empêcher ceux qui en sont privés de participer à la vie de la société.»

  1. Proposition de Droit à l’Energie SOS FUTUR
  • Inscrire dans l’Union européenne le Droit à l’accès à l’énergie comme un Droit fondamentale de l’homme ;
  • Inscription dans la constitution de chaque Nation de l’Union « le droit à l’énergie comme un droit fondamental de l’être humain. »
  • Le Droit à l’énergie pour tous les Européens par l’adoption d’une législation Européenne et nationale concrète interdisant les coupures de fourniture de l’énergie aux consommateurs vulnérables, et en pauvreté énergétique, quelle que soit la période de l’année.
  • Maintien des tarifs réglementés et des tarifs sociaux dans le secteur de l’énergie pour les ménages.
  • Demande à la commission Européenne la réalisation par un cabinet indépendant du bilan de 20 ans de libéralisation du marché de l’énergie en Europe.
  • Création d’une agence Européenne de l’énergie (traitant de la politique énergétique, des enjeux climatiques et de la précarité énergétique en Europe).
  • Définition et reconnaissance dans l’UE de la précarité énergétique et de la pauvreté énergétique.
  • L’application d’une TVA sur le kWH en Europe identique au produit de première nécessité.
  • La maitrise publique pour le développement des ENR en Europe pour répondre aux enjeux climatiques et non à l’intérêt financier des producteurs.

Gilles Pereyron, Vice-président, Droit à l’Energie SOS FUTUR

Valérie Gonçalvès, Secrétaire Générale, Droit à l’Energie SOS FUTUR

  1. European Commission. Energy poverty may affect nearly 11% of the EU population. [Online] 2015. https://ec.europa.eu/energy/en/news/energypoverty-may-affect-nearly-11-eu-population
  2. L’EPEE, consortium EPEE Intelligent Energy Europe, ADEME, CLERC …… 2009
  3. INSEE. L'Institut national de la statistique et des études économiques collecte, produit, analyse et diffuse des informations sur l'économie et la société françaises.
  4. Eurelectric analyse sur les facteurs expliquant l’évolution des prix « Making sens of your electricity bill »mars 2016.

Montreuil, le 11 juillet 2017

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